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Le sonneur en Normandie

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A l’aube du XXème siècle, l’abbé Letacq, naturaliste ornais, disait du Sonneur à ventre jaune qu’il « n’est pas très rare » ajoutant qu’« il est facile de l’observer après les grandes pluies d’orage dans les flaques d’eau des champs, des prairies et des chemins ». Au même moment, le docteur Maurice Régimbart écrivait à Henri Gadeau de Kerville, zoologue, « ce batracien n’est pas rare aux environs d’Evreux ; je l’ai pris dans bien des endroits et l’ai entendu sans le voir dans bien d’autres ». Ainsi s’accumulaient les témoignages naturalistes au sujet du Sonneur en Normandie jusqu’au milieu du XXème.

Au XXIème siècle, le Sonneur est en danger critique d’extinction du fait de son isolement. La disparition des habitats pionniers qu’il affectionne, notamment en contexte alluvial, est une des causes principales du déclin majeur de l’espèce, réduisant aujourd’hui sa présence à une seule commune dans la vallée de l’Iton (Eure). Suite à sa redécouverte en 2001, le site de reproduction a fait l’objet d’une désignation en Natura 2000 dont l’animateur du Document d’objectifs est la Communauté d’Agglomération Seine-Eure.

Malgré les mesures de renforcement efficaces menées par l’Agglo Seine Eure sur cette unique population normande, son maintien à l’échelle régionale reste incertain. En effet, des prospections intensives (classiques et via ADN environnemental) n’ont pas permis de mettre en évidence la présence d’autres individus ou de contact avec la population sarthoise voisine. De plus, la concurrence avec la Grenouille rieuse, signalée pour la première fois au début des années 1990 dans les vallées normandes et présente au sein du site Natura 2000 depuis 2013, est préoccupante : fort potentiel colonisateur face aux sonneurs délaissant les sites aquatiques qu’elle occupe, risque de prédation, compétition alimentaire, transmission de maladie.

Par conséquent, la réintroduction d’individus issus de la population normande dans des habitats restaurés de la vallée de l’Iton est une priorité dans le cadre des politiques de conservation du patrimoine naturel régional, voire national ; sa disparition marquerait la fin d’une longue recolonisation après la dernière grande glaciation à partir du refuge des Balkans et donc d’un formidable patrimoine génétique.

L’aire de répartition du sonneur à ventre jaune s’étend des Pyrénées jusqu’en Grèce et à la Mer noire, en passant par le centre de l’Allemagne et l’Italie. On retrouve donc le sonneur principalement sur la partie Est du territoire français (carte 1).

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Carte 2. Répartition du Sonneur à ventre jaune en Normandie (Barrioz et al., 2015).

Étoile rouge : dernière population de Normandie

Cercle bleu : observations 1970-1989

Point bleu : observations à partir de 1990

Carte 1. Répartition du Sonneur à ventre jaune en France (Lescure & Massary, 2012).

Dans l’Orne et le Calvados, deux observations d’individus esseulés ont été réalisées depuis 1994 (signalées par des « ? » sur la carte 2). Les populations voisines les plus proches et connues à ce jour se situent dans la Sarthe où 155 adultes ont été dénombrés, ainsi que dans le Loir-et-Cher où subsiste une station relictuelle estimée à moins d’une vingtaine d’individus.

A noter que le site que l’espèce occupe est presque aussi rare que l’espèce elle-même : cette ultime population se trouve dans un espace d’environ trente hectares, composé d’une dizaine d’hectares de prairies pâturées par des bovins de manière assez extensive, ponctuées d’un riche réseau de sites aquatiques (mares ou fossés) et ourlées au nord d’un bois alluvial (avec une dizaine de chablis, petites dépressions ou fossés). Une oasis au milieu d’un paysage largement dominé par les grandes culture et pauvre en sites aquatiques.

Pour en savoir davantage : https://revue-sesame-inrae.fr/en-normandie-une-oasis-delevage-bovin-extensif-pour-le-sonneur-a-ventre-jaune/ 

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